Nous admirons tous le Qatar et Dubaï. En Afrique, dans nos capitales où chôment tant de nos jeunes désoeuvrés rêvant d’une vie meilleure, nous nous époumonons souvent à rêver de voir un jour nos pays ressembler au Qatar, devenir comme Dubaï, où tout semble si bien fonctionner, où les immeubles poussent chaque jour, où la richesse semble augmenter si vite, chaque année, et nous nous demandons ce qui fait que, eux, puissent y arriver et, nous, non.
Parfois nos jeunes se prennent même d’envie d’y aller. Et nos propres leaders, honteusement, prennent ces pays en référence, comme si, eux-mêmes, incapables de faire pareil, se mettaient à fantasmer sur ce que les autres font chez eux, qu’ils n’arrivent pas, eux, à accomplir, chez nous.
On a même entendu Brice Clotaire Oligui Nguema du Gabon, dans une de ses crises de fantasmagorie, vanter Dubaï, disant que les Gabonais veulent des gratte-ciels comme à Dubaï et c’est ce qu’il va leur offrir.
Je veux bien.
Mais, au moment où nous commençons à cultiver la xénophobie chez nous et d’en faire un outil officiel de gouvernance, combien d’entre nous savent que :
1) Au Qatar, la grande majorité de la population est composée d’expatriés. Les résidents non Qataris représentent environ 88,4 % de la population totale, tandis que les Qataris eux-mêmes, c’est-à-dire les Qataris avec la citoyenneté qatarie ne constituent que 11,6 % de la population. Ainsi, sur une population d’environ 2,98 millions d’habitants, environ 2,63 millions sont immigrants et seulement environ 350.000 Qataris.
2) À Dubaï, la grande majorité de la population est, aussi, étrangère. Selon les estimations, environ 85 à 90 % des résidents de Dubaï sont des expatriés, les 10 à 15 % restants étant des Émiratis. Cela signifie que sur une population totale d’environ 3,655 millions d’habitants (en décembre 2023), une part importante est constituée de ressortissants étrangers.
Et pourtant, nous admirons ces pays.
Ces pays où la richesse se monte aujourd’hui à 121.000 dollars par habitant en valeur PPA (Parité de pouvoir d’Achat) pour les Qataris (plus que les USA qui se situent à seulement 89.105 dollars en valeur PPA) et les Émirats Arabes Unies, où se trouve Dubaï, à 81.680 par habitant en valeur PPA.
Posons-nous la question de savoir pourquoi nous les admirons tant, pourquoi tant de gens rêvent d’y aller, pourquoi ceux qui y sont allés aiment se montrer en photos, devant ces immeubles, ces gratte-ciels et toutes ces autres choses, accomplies par les Qatari et les Émiratis, qui nous émeuvent tant, pourquoi et comment ils en sont arrivés à ce que nous admirons chez eux, qui n’existe pas chez nous, et comment nous, nous en sommes arrivés à ne pas pouvoir avoir ce que nous admirons chez eux, qui existe chez eux.
Une fois que nous nous serons posé ces questions, nous pourrons commencer à nous rendre compte d’une seule et unique vérité : Les dictateurs et incompétents qui n’ont aucune solution pour les souffrances — causées par eux-mêmes — de leurs peuples ont toujours utilisé la xénophobie comme arme de distraction massive.
Pr Daniel Mengara
Congrès des Citoyens Libres